Idée reçue : « au Moyen Age, la France est sous-développée »
Voilà bien un préjugé qui émane de nos cerveaux ‘’modernes’’ qui ne peuvent concevoir de développement en dehors de la ville et de l’industrialisation ! Au Moyen Age, la France est rurale, certes, mais pas du tout sous-développée. Le paysan d’alors vit bien mieux que le paysan d’un de nos actuels pays du tiers-monde. La civilisation médiévale est fondée sur le château et notamment sur la court (ou cour du château), qui est le lieu où tout le monde se rencontre. C’est la civilisation courtoise. Le château est le lieu vital du domaine, l’asile en cas d’attaque, l’organe de défense, le centre culturel, le garant du code d’honneur et des rituels sociaux. Cette civilisation ne doit rien à la ville, mais elle existe, c’est un fait, et n’est pas inférieure à d’autres civilisations exclusivement urbaines.
Agriculture/élevage
La période qui va du Xe au XIIIe siècle voit l’avènement de plusieurs techniques d’importance : l’introduction du fer dans les outils agricoles, le ferrage des chevaux, le collier d’épaule et l’attelage en file (au lieu de côte-à-côte) qui vont permettre le trait de charges plus lourdes, la charrue à soc et à versoir qui remplace l’araire des Romains. Le moulin est connu depuis longtemps, mais c’est au XIe siècle qu’on a l’idée de profiter de la force de l’eau pour le faire tourner (dans l’Antiquité, il était actionné par des esclaves ou des animaux). Puis, on inventera le moulin à vent au XIIe siècle. De nouvelles cultures sont introduites : lin, plantes à pigments pour les couleurs, plantes maraîchères. Enfin, c’est l’époque des grands déboisements pour dégager des terres agricoles (immense travail accompli par des moines et des paysans que même les Romains n’avaient pas osé entreprendre).
Transports
A l’époque médiévale est souvent associée l’image d’immobilisme. Le serf est attaché à sa terre (!) et, de toute façon, le paysan n’a pas de loisir de voyager. D’ailleurs qu’irait-il faire ailleurs ?
Non seulement les moyens de transports existent et sont variés, mais aussi les hommes du Moyen Age n’hésitent pas à les utiliser: cheval, âne, carriole, mais aussi transport fluvial. Le moyen le plus rapide pour voyager est la mer : un navire peut faire jusqu’à 300 km en 24 heures. On invente le gouvernail au 12ème siècle, on importe l’astrolabe, on perfectionne la boussole et on a des cartes des côtes très précises. Remarquons au passage que les grands explorateurs sont de la toute fin du Moyen Age et non de la Renaissance : Marco Polo, Christophe Colomb, Vasco de Gama. On voyage pour aller aux foires, pour aller à l’église (qui n’est pas forcément près du village ou du hameau), pour aller en pèlerinage, pour aller au château ou à la ville régler une question administrative… Preuve que les voyageurs sont déjà nombreux est qu’il existe dès la période féodale des péages (souvent sur des ponts) et qu’on a trace d’embouteillages dans les villes où les rues sont étroites et l’animation grande.
Techniques
Là aussi, nous allons battre en brèche la vision d’un Moyen Age obscurantiste et abruti.
Petit tour d’horizon des inventions de la période féodale : treuil à levier (14e s), vérin, arbre à cames (10e s), rouet (1280), métier à tisser horizontal (12e – 13e s), brouette (13e s), conduit de cheminée (9e s), trébuchet (12e s), arbalète (10e – 12e s), gouvernail (1250), lunettes de vue (Robert Grossetête 1286). Citons celle qui n’est pas la moindre : l’invention de l’horloge mécanique à verge et foliot (au 11e siècle) par un moine (Gerbert d’Aurillac) pour régler les prières. C’est une petite révolution qui franchit bien vite les murs des monastères pour conquérir les cités.
Artisanat/commerce
L’artisanat et le commerce sont essentiellement urbains dans une société alors majoritairement rurale. Même si leur plein essor se situe au 16ème siècle et après, ils sont vivants dès la période féodale.
Il existe un grand nombre de métiers très spécialisés qui ont disparu depuis : volailler, agnelier, ciergier, parcheminier. Il existe une organisation rigoureuse des métiers : ce n’est pas la ‘’jungle’’ : l’apprentissage dure des années sous la direction d’un maître. L’apprenti devient compagnon et fait son chef d’œuvre jugé par des anciens. C’est le système toujours en cours de nos jours ! Les maîtrises, jurandes et guildes (les corporations n’apparaîtront qu’au 16ème siècle) surveillent les bonnes pratiques d’un métier : validité des formations, horaires de travail, qualité des produits. Elles distribuent des amendes. On assiste alors à la naissance des grandes villes de commerce : Bruges, Gand, Gênes, Venise et des foires qui durent plusieurs semaines dont les foires de Champagne. Des produits précieux font leur apparition : épices, soie, huile d’olive, cannelle, poivre, confitures, fourrures, pastels, parchemins.
2 réflexions sur « Idée reçue : « au Moyen Age, la France est sous-développée » »
Signalons aussi que l’inventeur de l’horloge, Gerbert d’Aurillac, est devenu le Pape Sylvestre II, premier pape français… Alors, l’Eglise n’aime pas le progrès scientifique ? 🙂
Vous oubliez l’essentiel : l’invention de l’art gothique, qui est la première véritable innovation artistique apparue dans les environs de la Méditerranée depuis l’Égypte antique. D’ailleurs, voici un argument massue suffisant à lui seul à démonter toute cette propagande laïcarde : le peuple qui a édifié les cathédrales gothiques ne PEUT PAS être un peuple arriéré.