Idée reçue : « Au Moyen-Age, les paysans sont tous esclaves »

Idée reçue : « Au Moyen-Age, les paysans sont tous esclaves »

Parmi les idées reçues autour de l’Inquisition, circule celle selon la quelle les paysans sont tous esclaves au Moyen-Age.

C’est doublement faux. D’une part, les paysans ne sont pas esclaves, ils sont serfs. D’autre part, ils ne sont pas tous serfs.

Le serf médiéval n’a rien à voir avec l’esclave gréco-romain. D’abord, ce n’est pas une chose, mais un homme. Le seigneur n’a pas droit de vie et de mort sur lui comme le pater familias romain sur son esclave. Le serf peut se marier, avoir des enfants, hériter et posséder des biens. Il obtient la part de moisson de la terre qu’il cultive. A sa mort, sa terre et ses biens reviennent à ses enfants et non au seigneur. Autant de droits reniés à l’esclave romain.

Ensuite, le servage n’est pas une catégorie sociale, mais un état qui peut être temporaire. En effet, le serf peut racheter son servage. Le serf n’appartient pas à son seigneur, mais à sa terre. Certes, être attaché à sa terre peut être vu comme une privation de liberté. Cependant, en période de disette, de guerre ou d’instabilité politique, c’est plutôt une garantie contre l’expropriation arbitraire ou l’enrôlement forcé. Il est recensé des cas d’hommes libres qui se sont faits serfs par intérêt. Le seigneur se doit, à une toute autre échelle, aux mêmes obligations que le serf : il ne peut ni vendre, ni aliéner, ni déserter sa terre car elle ne lui appartient pas en propre, mais elle appartient à sa lignée. Le seigneur n’en a qu’un droit d’usage, tout comme le serf !

Tous les paysans ne sont pas serfs. Beaucoup sont des hommes libres qui peuvent louer leur terre au seigneur, se louer comme saisonniers ou être propriétaires.

Au fil du temps, les incapacités frappant les serfs se transforment en taxes. Puis le servage recule. L’essor urbain pousse certains à renoncer à la terre, ce qui les affranchit de fait. Un paysan libre obtenant de meilleurs résultats et risquant moins de partir vers la ville, les seigneurs abandonnent peu à peu le servage. Un serf peut racheter sa liberté, individuellement ou collectivement (négocié par la communauté villageoise). Notons que l’Eglise encourage ce mouvement d’émancipation qui s’accélère dès le IXe siècle. Le moine Suger, ami et conseiller de Louis VI et de Louis VII, est fils de serfs. A la mort de Saint Louis, le servage a pratiquement disparu en France.

Il est intéressant de noter que l’esclavage fut la base des civilisations grecque, romaine et égyptienne, les ‘’grandes civilisations’’ que la Renaissance admirera. L’esclavage réapparaitra justement au XVIe s. et sera par la suite largement pratiqué dans les colonies d’Amérique puis françaises pour n’être aboli qu’en 1848. Simple hasard ? Notre époque éprise d’orientalisme admire quant à elle la civilisation musulmane qui fut elle aussi éminemment esclavagiste. Cessons donc d’avoir honte de notre passé chrétien. L’esclavage avait totalement disparu de France du VIe s. au XVIe s ; et c’est clairement grâce au christianisme.

One thought on “Idée reçue : « Au Moyen-Age, les paysans sont tous esclaves »

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *