Inquisition : comment se déroule un procès ?
Comment se déroule un procès ?
1 – L’inquisiteur commence par une prédication générale.
2 – L’inquisiteur publie l’édit de foi, qui oblige les fidèles à dénoncer les hérétiques de leur connaissance. Le nom des dénonciateurs est tenu secret pour éviter les représailles. Mais certains inquisiteurs préfèrent procéder à une confrontation contradictoire entre accusé et dénonciateur afin que l’accusé puisse démasquer un dénonciateur qui aurait intérêt à lui nuire. Rappelons qu’en cas de faux témoignage, le dénonciateur risque la peine encourue par l’accusé.
3 – L’inquisiteur publie l’édit de grâce, qui accorde un délai de 15 à 30 jours aux hérétiques pour se rétracter. Passé ce délai, l’hérétique présumé est justiciable du tribunal inquisitorial.
4 – Le procès n’est pas le règne de l’arbitraire. C’est tout le contraire. L’Inquisition est méthodique, formaliste, paperassière et…plus tempérée que la justice civile !
5 – L’accusé est en détention préventive ou libre. Il a le droit de produire des témoins à décharge, de récuser ses juges et même de récuser l’Inquisiteur lui-même ! Il bénéficie d’un défenseur.
6 – Le premier interrogatoire a lieu en présence de prud’hommes, jury local composé de clercs et de laïcs dont l’avis est entendu avant la sentence.
7 – Les assesseurs du procès doivent contrôler la véracité des accusations, notamment auprès des dénonciateurs.
8 – Si l’accusé est reconnu coupable et maintient ses dénégations, il subit un interrogatoire complet dont le but est de recueillir ses aveux. La condamnation doit être prononcée après un aveu formel ou au vu de preuves irréfutables. En cas de doute, le mot d’ordre de l’Inquisition est qu’il vaut mieux relâcher un coupable que condamner un innocent.
La question de l’obtention de l’aveu:
Pour obtenir l’aveu, la contrainte peut être utilisée, soit par la prolongation de l’emprisonnement, soit par la privation de nourriture, soit par la torture. Longtemps, l’Eglise a été hostile à cette 3ème solution. La torture a été condamnée dès la fondation de l’Inquisition par le décret de Gratien (12ème siècle). Mais, au 13ème siècle, la redécouverte du droit romain entraine le rétablissement de la torture dans la justice civile. En 1252, Innocent 4 autorise de même son usage par les tribunaux ecclésiastiques, à condition que la victime ne risque ni la mutilation ni la mort, que l’évêque du lieu ait donné son accord et que les aveux soient renouvelés librement.
Elle reste cependant peu pratiquée: moins de 10% des cas selon Olivier Tosseri in 150 idées reçues sur l’Histoire alors qu’elle est très utilisée par les tribunaux séculiers. L’Inquisition espagnole l’utilise aussi très peu : avant 1500, sur 300 procès devant le tribunal inquisitorial de Tolède, on relève 6 cas de torture. De 1480 à 1530, sur 2000 procédures du tribunal inquisitorial de Valence, on dénombre 12 cas de torture. Le manuel d’inquisition de Nicolas Eymerich (inquisiteur général d’Aragon) dit explicitement qu’il faut réserver la torture aux cas extrêmes et met en doute son utilité : ‘’La question est trompeuse et inefficace’’. L’historien américain du 19ème siècle Henri-Charles Lea, hostile à l’Inquisition, reconnait que ‘’dans les fragments de procédure inquisitoriale qui nous sont parvenus, les allusions à la torture sont rares’’ in Histoire de l’Inquisition au Moyen Age.
9 – On célèbre une messe et on prononce un sermon.
10 – Après consultation du jury, la sentence est prononcée. Les acquittés sont libérés et on prononce la peine des coupables. Notons ici que le verdict relève de la délibération d’un jury et non de l’arbitraire d’un seul juge. C’est révolutionnaire à l’époque et c’est bel et bien une création de l’Inquisition.
2 réflexions sur « Inquisition : comment se déroule un procès ? »
C’est consternant ! Et affligeant
Consternant de désinformation et affligeant de méconnaissance historique, à tous les niveaux !
C’est à peu près digne d’un enfant de dix ans ; encore mon fils – et ceux de mes amis – n’auraient jamais osé commettre par pudeur (j’allais dire par intelligence) ce genre de publication.
Mais pouvons-nous dénommer cet ensemble de vues simplistes et inacceptables une « publication » ?
Désolé, Monsieur le journaliste, mais l’actualité reste et restera l’actualité. Quant à l’histoire, elle est une affaire trop sérieuse pour l’abandonner à n’importe qui !
Comment osez-vous amoindrir les délits commis à l’encontre des droits de l’homme par l’Eglise catholique au fil du temps ? Et en particulier par le tribunal de l’Inquisition ? Alors que l’Eglise elle-même – notamment par la voix de ses papes contemporains (5 siècles après les faits il est vrai) demandent pardon pour ces méfaits épouvantables ?
Êtes-vous certain, M. Tosseri, de comprendre les réalités de cette terrible machine à broyer que fut l’Inquisituon ? A vous lire, la question n’est même plus à poser !
PS
Cher Monsieur, merci de votre commentaire. Vous semblez en colère et nous aimerons en connaître la raison profonde. La plupart des articles publiés ici le sont par des historiens et nous sommes ouverts à la discussion : n’hésitez pas à nous dire ce que, précisément, vous trouvez erroné. Vous nous dites que l’actualité reste l’actualité : que voulez-vous dire par là ? Est-ce à dire que c’est l’actualité qui est une vérité propre ?
Précisez-nous aussi, s’il vous plait, ces « délits commis à l’encontre des droits de l’homme par l’Eglise catholique », et nous pourrons ouvrir un procès (en sorcellerie ? 😉 ). Le fait que le pape Jean-Paul II ait demandé pardon – vous trouvez le texte ici même, dans cet article – ne signifie pas pour autant qu’il faut voir dans l’Eglise un monstre, et dans l’Inquisition aucune avancée pour la justice : nuançons nos propos, ne tombons pas dans l’obscurantisme.
(Ps : avez-vous bien lu cet article ? M. Tosseri est cité dans le texte, ce n’est pas l’auteur.)